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Benjamin Guillard : la pièce d'Hervé Le Tellier pose "la question de l'interprétation de l'écrit"

  • Écrit par : Julie Cadilhac

Benjamin GuillardPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Formé au Conservatoire national supérieur d’art dramatique, Benjamin Guillard est tout à la fois comédien, metteur en scène, scénariste et réalisateur de courts-métrages. Il a notamment joué sous la direction de Philippe Adrien, de Muriel Mayette et dernièrement, en, 2012, dans "Paroles Gelées" mis en scène par Jean Belllorini, et en 2014, dans "L’Affaire de la rue Lourcine" de Yann Dacosta. Il assiste François Morel dans sa mise en scène de "Bien des choses" puis le met en scène dans "La Nuit Satie" et dans "La fin du monde est pour dimanche". En 2014, c’est Olivier Saladin qu'il dirige dans "Ancien malade des hôpitaux de Paris" de Daniel Pennac ( Nominée aux Molières 2016). En 2015, il collabore à la mise en scène de "Réparer les vivants" d’Emmanuel Noblet d’après le roman de Maylis de Kerangal. En parallèle, Benjamin Guillard a réalisé trois courts-métrages : "Looking for Steven Spielberg" (2009), "L’avenir est à nous" (2016) et "Véhicule-École" (2012), ce dernier ayant été récompensé de plusieurs prix. En 2016, il monte « Moi et François Mitterrand » ( aux éditions Jean-Claude Lattès). Une correspondance loufoque d’Hervé Le Tellier interprétée par Olivier Broche. Il y est question d’un certain Hervé qui décide d’écrire au Président. En 1983, le secrétariat de Mitterrand lui répond par une lettre type. Mais Hervé ne l’interprète pas ainsi et se sent soudain confident et ami d’un grand de l’Histoire….

Quelle a été la genèse de ce projet théâtral?
La genèse est très simple. Hervé Le Tellier, qui connaissait François Morel, lui avait parlé de ce texte et François l'a fait connaître à Olivier Broche en lui disant qu’il pourrait le jouer et c’est à partir de là qu’Olivier m’a appelé - c’est un ami avec lequel j’avais déjà travaillé - pour que je le mette en scène.

Il s’agit d’un-seul-en-scène. Qu’est-ce qui vous séduit particulièrement dans cette forme théâtrale que vous avez expérimentée ces dernières années à plusieurs reprises avec "La fin du monde est pour dimanche" ( en compagnie de François Morel) ou encore Ancien Malade des Hôpitaux de Paris ( avec Olivier Saladin) ? Le challenge du monologue?
En fait, c'est un peu un hasard tout ça.  J’ai commencé avec "La fin du monde est pour dimanche". Puis Olivier Saladin avait envie de monter ce texte de Pennac et m’a proposé de le mettre en scène…Après, c'est vrai que j’aime beaucoup la forme du seul-en-scène qui pose des questions de dramaturgie qui m’intéressent. Ces pièces sont cependant très différentes les unes des autres.

Cette pièce se nomme « Moi et François Mitterrand » : le président nommé est-il seulement un prétexte à s’adresser à un grand de ce monde ou la personnalité particulière de François Mitterrand a son importance?
C’est un peu les deux. Oui, c’est important que ce soit François Mitterand parce qu’il y a pas mal de références historiques dans le texte en lien avec sa carrière, à propos de grands évènements et de choses plus anecdotiques…Après, ce personnage d’Hervé a des rêves un peu plus grands que lui donc dans l’idée de correspondre avec quelqu’un d’important, il trouve un réconfort à sa propre vie. C’est important que ce soit le président et ce qu’il représente comme figure historique, comme figure de monarque presque... après ça dépasse ce cadre-là dans la mesure où c’est, tout d’un coup, un personnage qui s’invente des amis et des gens importants autour de lui, avec qui il peut échanger, converser et donner son avis surtout! Il a envie de donner son avis, de se sentir confident de grandes choses.

Avez-vous travaillé dans le sens d’un mimétisme du personnage envers le président?
Oui, le personnage est complètement admiratif de Mitterrand. Il est admiratif parce qu’il a l’impression que Mitterrand va lui répondre donc il se sent presque son égal. Admiratif de Mitterrand et de la relation qu’il pense avoir entretenue avec lui.

Vous êtes-vous nourri d’autres lectures, de documents en dehors du texte d’Hervé le Tellier pour créer ce spectacle? Quelle a été votre méthode?
On a d'abord travaillé sur le texte, changé des petites choses à droite à gauche, inventé des petits trucs aussi…On a regardé des vidéos, des moments un peu importants de Mitterrand évidemment mais après, le travail s'est fait vraiment au plateau.

Quand on travaille en tête à tête avec un comédien, on suppose que cela nécessite une grande complicité ; qu’est-ce qui vous  séduit particulièrement dans le jeu et la personnalité  d’Olivier Broche?
Je connais très bien Olivier puisqu’on est amis maintenant depuis quelques années. Je réalise aussi des courts-métrages et il se trouve qu’il a participé aux deux derniers. On a donc déjà pas mal travaillé ensemble, on a une relation d’amitié, ce qui fait qu’on se comprend. C’est un comédien que je trouve assez étonnant ; il a une énergie très particulière, un sens du rythme très important, une fantaisie palpable. C’est un comédien que j’aime beaucoup et, en plus, c’est un texte qui lui va comme un gant!

C’est un seul-en-scène qui a l’air un peu fantasque comme, dans un autre registre, l’était celui des "Hôpitaux de Paris" ou de "La Fin du monde est pour Dimanche"…Ces personnages fantasques, ces univers poétiques et décalés vous touchent-ils particulièrement ?
Le point commun, c’est qu’il y a une grande tendresse; ce sont des personnages très attachants, un peu perdus et c’est vrai que ça me touche beaucoup les gens qui sont, soit très seuls, soit qui ont des rêves un peu trop grands pour eux ; quelque chose de cet ordre-là. Dans "Ancien Malade des Hôpitaux de Paris ", il y a ça aussi : on sent que la vie est passée, que ce n'est pas évident …Tous ces personnages se sentent perdus et essaient de sortir comme ils peuvent de cette condition-là.

"Moi et François Mitterrand", c'est l'histoire d'« un homme qui se sauve de son existence ordinaire en s’inventant une place dans l’Histoire », c’est bien ça?
Exactement.

C’est une correspondance. Comment avez-vous travaillé cette spécificité textuelle sur le plateau?
C’est une correspondance un peu particulière déjà! Mais oui, bien sûr, ça a posé des questions d’adresse et de mises en espace. C’étaient les plus grandes interrogations auxquelles on s'est confronté.

[bt_quote style="default" width="0"]Ce qui était important, c’était de faire le portrait de quelqu’un, de dépasser le côté "correspondance" et de laisser voir en filigrane se dessiner un personnage. Au travers toutes ces lettres, on découvre une solitude et... une humanité. [/bt_quote]

Est-ce que l’accessoire-lettre est présent sur scène? S’en sert-on?
Oui, les lettres sont montrées avec une sorte de rétro-projecteur, pas de manière systématique mais souvent quand même. Les lettres sont vues et aussi prises en charge et incarnées par le comédien.

Il y a également de la musique dans cette pièce?
Oui, on entend le Te Deum de Marc-Antoine Charpentier. Il y a aussi des chansons qui ont été écrites par Hervé Le Tellier et qui ont été composées par Antoine Sahler, un camarade - notamment de François Morel - qui fait des chansons.

Le mot de la fin?

Ce qui est important de signaler dans ce texte et dans ce spectacle, je crois, c'est que ça pose aussi la question de l’interprétation de l’écrit. Aujourd’hui, quand on reçoit un texto ou un mail, on se pose toujours la question de savoir ce qu’il peut y avoir derrière et ça c’est intéressant je trouve. Comment on peut interpréter un texto ou un mail de manière différente…ce qu’on projette sur des choses écrites. C’est au coeur de cette pièce. Comment on peut lire les choses écrites et comment on peut les lire différemment.

[bt_quote style="default" width="0"]Cette pièce soulève une question très intéressante : celle de l’interprétation de l’écrit. Aujourd’hui, quand on reçoit un texto ou un mail, on se pose toujours la question de savoir ce qu’il peut y avoir derrière.... Comment on peut interpréter un texto ou un mail de manière différente…ce qu’on projette sur des choses écrites. Voilà ce dont parle aussi "Moi et François Mitterrand."[/bt_quote]

Moi et François Mitterrand
De : Hervé Le Tellier
Mise en scène : Benjamin Guillard
Avec : Olivier Broche
Scénographie : Jean Haas
Assisté de : Juliette Azémar
Lumière : Olivier Oudiou
Direction technique : Denis Melchers
Assistanat : Kenza Berrada
Dramaturgie : Marie Duret-Pujol
Musique : Antoine Sahler
Répétitrice piano et chant : Lucrèce Sassella

Dates et lieux des représentations:

- A Marseille, Du 16 au 24/9/16
 - Théâtre des Bernardines
- A Nimes, 6 et 7 octobre 2016
 - Théâtre de Nîmes
- A St George de Didonne, 11/10/2016
 - Créa
- A Paris (Rond-Point), du 14/10 au 20/11/2016
 - Le Rond Point
- A Montargis, 1er et 2 décembre 2016 - 
Le Tivoli
- A Chatellerault, 09/12/2016
 - Nouveau Théâtre
- A Tourlaville, 15/12/2016
 - Espace culturel Buisson
- A Deville-les Rouen, 07/03/2017
 - Centre culturel Voltaire
- A Chalons en Champagne, 28 et 29 mars 2017
 - La Comète
- A Quimper, 10/05/2017
 - Théâtre de Cornouaille

- A Compiègne, 9 janvier 2018
- A Saint-Maurice, 13 janvier 2018
- A Sablé sur Sarthe, 18 janvier 2018
- A Saint-Lo, 20 janvier 2018
- A Villemoisson, 27 janvier 2018
- A Luneville, 2 février 2018
- A Cognac, 6 février 2018
- A La Soutterraine, 8 février 2018
- A Chartres, 10 février 2018
- A Toulouse (salle Sorano), 9 et 10 mars 2018
- A Eysines, 28 mars 2018
- A Nevers, 4 et 5 avril 2018
- A Amiens (Comédie de Picardie), 23, 24, 25 et 26 mai 2018

A lire aussi ( du même metteur en scène):

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