"Françoise Hardy. La discrète" : portrait sensible du mystère…
- Écrit par : Serge Bressan
Par Serge Bressan - Lagrandeparade.com / L’un dit : « Personne ne sait comment Françoise Hardy est arrivée sur cette planète. Jusque là, il n’y avait personne comme elle » L’autre : « C’est une artiste un peu mystérieuse, un peu méconnue finalement ». Encore d’autres, comme le photographe Jean-Marie Périer : « C’est la personne la plus pure que j’ai rencontrée de ma vie », ou la chanteuse La Grande Sophie : « C’est l’élégance, pour moi ». Quant à Bertrand Burgalat (producteur, musicien, compositeur, arrangeur et chanteur), il assure : « Elle met la barre très haut, quand même ! » Née le 17 janvier 1944, Françoise Hardy s’est glissée dans le PCF (Paysage de la Chanson Française) en 1961- longue jeune fille aux cheveux longs et bruns. C’était, en France, les premiers temps du rock et du yéyé. L’année précédente, en récompense de sa réussite au premier bac, elle a reçu une guitare- elle écoute du rock sur une radio étrangère, elle se souvient : « Une fois que j'ai eu mon deuxième bac, alors je me suis occupée de la guitare que j'avais délaissée pendant un an, enfin dont je ne m'étais pas occupée du tout pendant un an, et puis j'ai fait quelques chansons »… Début d’une histoire qui court sur, maintenant, sur six décennies. Début d’une histoire matière à « Françoise Hardy. La discrète », un joli documentaire réalisé par Emilie Valentin et Matthieu Jaubert, un délicieux et sensible portrait du mystère.
Du Petit Conservatoire de la Chanson dirigé par Mireille et d’un premier succès (« Tous les garçons et les filles ») en 1962 à son dernier album en date (« Personne d’autre », 2018), tout y est. Tout ce qu’a été Françoise Hardy. Tout ce qu’elle est. Hier à peine la vingtaine et idole des jeunes au temps du yéyé et du « Swinging London », aujourd’hui à 76 ans icône de la pop. Elue autrefois « femme idéale » par Mick Jagger, objet d'un poème de Bob Dylan, couverte d'or par Paco Rabanne- et Burgalat de préciser : « Dans les années 1990, elle a acquis une place à part dans la chanson française. Dans le voisinage d’Alain Bashung et Serge Gainsbourg »… Un musicien allemand ajoute : « Avec une si belle voix, même Elephant Man aurait eu du succès ! » C’est pourtant Françoise Hardy elle-même qui, dans les années 1960, affirmait : « Je ne sais pas chanter. J’ai toujours eu, j’ai encore la voix blanche. Je chante juste relativement, mais enfin… » En 2015, elle confie : « Ça n’a pas changé… Chanter, ça ne m’est pas naturel, ça m’est très très difficile… Quand je dois faire les voix en studio, j’ai toujours une appréhension terrible… » Pourtant, à en croire La Grande Sophie, « c’est une voix qui marque. Avec Françoise Hardy, on est tout de suite dans l’intimité. J’ai l’impression qu’elle va toucher au plus profond quelque chose qui est en nous, qu’elle ne parle qu’à nous ».
Ah ! la voix de Françoise Hardy… « Elle a une voix, confie la chanteuse Elodie Frégé, qui est à la fois du velours et un truc très sec. Une voix qui est faite pour raconter des histoires ». Des histoires où, dès le début, transpirent la mélancolie. L’intime. La discrétion. Françoise Hardy, la discrète qui, très vite, se sentira décalée, déplacée dans ce monde de la chanson, de la musique. Et qui, un temps, se demandera si elle doit continuer à évoluer dans ce PCF ou voguer vers d’autres rivages, d’autres centres d’intérêt (ainsi, pendant sept ans, elle animera une émission d’astrologie à la radio). La vie de Françoise Hardy, c’est aussi une série de rencontres. Avec Jacques Dutronc- ils se marieront en 1981. Avec Michel Berger qui lui offrira en 1973 une de ses chansons aussi tubesques qu’essentielles, « Message personnel ». Avec Gabriel Yared, l’immense compositeur et arrangeur césarisé à Paris et oscarisé à Hollywood. Avec Etienne Daho, « un fan dont je suis devenue une fan absolue », glisse-t-elle. Avec le groupe britannique Blur et son épatant leader Damon Albarn…
Et, évoquant Françoise Hardy, Jacques Dutronc, de son repère corse, de conclure : « Jean Gabin, c’était génial comment il l’avait surnommée… Il l’avait surnommée « la discrète »… C’est bien comme surnom, non ? » Une discrète qui a su, selon les mots de Bertrand Burgalat, « rester digne et propre » tout au long de sa carrière. Une discrète qui nous a fait cadeau de près de trente albums entre 1962 et 2018 avec mon amie la rose ou encore de la musique saoule, et de tant de belles choses…
Françoise Hardy. La discrète
Arte, vendredi 1er mai 2020, 22h30
Durée : 54 minutes
Réalisateurs : Emilie Valentin et Matthieu Jaubert
Coproduction : ARTE France, Ex Nihilo
Et disponible à ce lien du 24/04/2020 au 18/06/2020 : https://www.arte.tv/fr/videos/064471-000-A/francoise-hardy-la-discrete/