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Tandis que je me dénudePar Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ Auteure d’un roman, « Mesdames, souriez » (Fayard 2005), de nouvelles et d’un essai, « Tu peux sortir de table » (Fayard 2008), Jessica L. Nelson est chroniqueuse littéraire sur TF1 depuis quelques années. Elle connait donc bien le « monde » de la télévision. Elle en a fait le sujet de son nouveau roman : « Tandis que je me dénude », paru chez Belfond. Qu’elle aurait pu intituler : « A poil ! », ou "les M’as-tu vu à la télé ?". Son personnage (son double ?), Angie Rivière, professeur, participe à une émission de télévision afin de présenter son premier roman, « Bébés de brume ». Elle ne se sent pas à l'aise, à l'impression que les personnes présentes sur le plateau scrutent son intérieur, son intimité. Plus le temps passe, devant les caméras, plus les blessures du passé ressurgissent et se mêlent à ses interrogations existentielles.
L’intérêt du roman de Jessica L. Nelson réside dans sa structure narrative. En effet, tous les invités du « plateau » ont leur mot à dire…à penser plutôt. Un peu comme les anges des « Ailes du désir », de Wim Wenders, nous entendons les pensées de l’animateur, des acteurs et autres auteurs vedettes, ainsi que des membres du public qui servent de décor au « show » et même d’une téléspectatrice, la narratrice, qui n’en peut plus de ce miroir aux alouettes, où tout est joué, surjoué, déjoué. Va-t-elle finir par exploser ? Ou imploser, comme un poste de télévision?

Tandis que je me dénude

Auteur : Jessica L. Nelson

Editions : Belfond

237 pages, 17 euros


 

La Derniere nuit du RaisPar Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ S’il y a bien un écrivain qui peut et sait écrire sur les conflits du Moyen-Orient et sur les dictateurs et autres fondamentalistes islamistes (entre autres…), c’est  Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul (il utilise pour son pseudonyme les deux prénoms de sa femme). Tout simplement parce qu’il les a combattus, dans les années 90, sur le terrain, ces "fous d’Allah", lorsqu’il était dans l’armée algérienne. Il sait de quoi ils sont capables, et incapables… Yasmina Khadra est en effet l'auteur de la célèbre trilogie contenant Les Hirondelles de Kaboul, L'Attentat (prix des Libraires) et Les Sirènes de Bagdad, vendue à des centaines de milliers d'exemplaires. Certains de ses titres : Ce que le jour doit à la nuit (meilleur livre de l'année 2008 pour le magazine Lire et prix France Télévisions) et L'Attentat ont été adaptés au cinéma. Cette fois, l’écrivain ambitieux met en scène Mouammar Khadafi et les ultimes heures qu'il a vécues (les dernières pages sont poignantes) dans son nouveau roman : La Dernière Nuit du raïs, paru aux éditions Julliard. Yasmina Khadra raconte l'histoire du chef de l'État libyen à la première personne du singulier. Son récit débute à Syrte, dans la nuit du 19 au 20 octobre, là même où le chef de l'État libyen a trouvé la mort. Ensuite, le roman se déroule par flash-back. La Dernière Nuit du raïs nous éclaire sur la face cachée d'un homme né sous le signe d'une injustice, qui voulut sauver son peuple mais ne fit que se substituer à lui. Sans projet de société probant, le tyran privilégia la répression la plus brutale, conjuguant purges sanglantes et démagogie claironnante.
Traduit dans trente-six pays, Yasmina Khadra a expliqué, lors du salon du livre de Bilbao, à un journaliste du Figaro, pourquoi il s'était intéressé à un tel personnage : « Les plus grands écrivains se seraient intéressés à Kadhafi. Tolstoï aurait aimé, Homère ou Shakespeare aussi. Et Rabelais aurait écrit une trilogie Pantagruel, Gargantua et Kadhafi! C'est un personnage de tragédie », a conclu le spécialiste des sujets « explosifs ». Si la modestie ne l’étouffe pas, il faut reconnaître que Yasmina Khadra a largement démontré qu’il faisait partie des écrivains qui comptent. C’est une plume rare et singulière, à la fois classique, par son style, et moderne, pour la thématique actuelle de ses romans. Un écrivain de la veine des raconteurs d’histoires. Pas des storytellers à l’américaine, faiseurs de best-sellers formatés pour le grand public, mais des écrivains engagés, disant le monde dans lequel ils vivent. C'est également un poète de la prose, de l’acabit de Stevenson et des Mille et Une Nuits. La plume de Yasmina Khadra est pleine de lyrisme, de sensibilité et de souffle. Il sait dire l’amour comme la mort et la langueur méditerranéenne, comme sa violence la plus extrême. Depuis Morituri, dans lequel un flic algérien, Brahim Llob, était aux prises avec la nomenklatura locale, il a fait du chemin. Récemment, il était revenu à ses premières amours, l'Algérie d'aujourd'hui, en dressant, avec Qu'attendent les singes (Julliard), un portrait sombre et déliquescent de son pays. La dernière nuit du Raïs n’est pas son meilleur roman mais il a le mérite d’être en phase avec le monde dans lequel nous vivons.

La dernière nuit du Raïs

Auteur : Yasmina Khadra

Editions: Julliard

250 pages, 19 euros

figurantePar Félix Brun - Lagrandeparade.fr / Louise traverse la grisaille d’une existence sans ciel bleu, sans lumière ; elle n’a jamais connu sa mère décédée à son accouchement ; elle a été élevée par un père marqué par son veuvage précoce, qui ne lui parle pas, qui ne lui a jamais parlé….Elle nettoie les chambres dans un vieil hôtel en province, sans éclat, tenu par un couple de "thénardier" des temps modernes. Dans ce décor de maussaderie et de monotonie, Louise va rencontrer une équipe de cinéma en tournage dans ce coin perdu….les promesses et les illusions vont lui faire tourner la tête : "Elle veut autre chose, elle souhaite d’autres mondes tout d’un coup. Elle ne sait pas où partir et qui fuir d’ailleurs." Partir, s’échapper de cette platitude, de cette tristesse, de ce désenchantement "et supplier le chauffeur de la conduire vers le soleil, vers la mer, là où l’horizon n’a point de fuite, là où tout est plat, où aucun bâtiment ne plonge dans l’asphalte, où l’horizon serait un fil tendu entre ses rêves et le soleil."  La vie de Louise va se trouver bouleversée par cet interlude chimérique : « ELLE a le sentiment de vivre dans un livre d’images sur lequel on pose un regard sans lire les mots qui les accompagnent. »
Pour un premier roman Dominique Pascaud redonne aux anti-héros la beauté des actes simples, de ces choses quotidiennes qu’on ne voit même plus. Les thèmes abordés (la mort, l’absurdité des relations, la culpabilité de la disparition de la mère, l’amour, l’amitié…) sont traités dans une écriture fluide qui traduit l’ambiance des situations, usant de métaphores à propos. A quand le prochain?

Figurante
Auteur : Dominique Pascaud
Editions : La Martinière

martine est sur gleeden

Par Félix Brun - Lagrandeparade.fr/ Vingt ans de vie commune, vingt ans de fidélité…et la routine, la monotonie s’installent dans le couple… "Oui j’ai vieilli ; non je n’ai pas fait attention ; oui nous nous sommes ennuyés, un peu, mais si peu, et tout de même…On en demande beaucoup à la vie, non ? Je vieillissais lentement, bêtement, irrésistiblement, en lisant des poèmes de François Cheng dans le lit encore chaud et conjugal, en t’imaginant avec tendresse assis à ton bureau, en train de jouer à des jeux innocents.[…]Quelque chose déraille mais ce n’est pas moi. C’est le monde qui déraille." Martine découvre que Pierre la trompe et a trouvé une maîtresse sur un site internet, en sélectionnant, en correspondant avec plusieurs interlocutrices, en essayant même ces créatures répertoriées, fichées. La rencontre, la relation choisie s’opère comme lorsque sur le catalogue La Redoute on recherche un produit ou un vêtement, que l’on va recevoir, tester et, en fonction du résultat escompté, on le réexpédie pour en commander un autre…!Martine trahie, trompée, abusée, va vouloir comprendre cette nouvelle forme de cocufiage contemporain, et va s’initier. "Depuis vingt ans qu’elle était fidèle et heureuse, Martine avait même oublié qu’ils existaient : les hommes. » A travers cette démarche, elle va découvrir l’illusion, la perfidie, les faux-semblants et la banalité des échanges…" Humour, rire, plaisir, douceur. Frisson, sensation, passion. Ils cherchent donc de la vie. Tous s’ennuient.[…] C’est cela qui est étrange dans ce site. La force des mots. Ce que l’on exprime de soi."
Un roman saisissant de sincérité et de lucidité, d’une auteure victime de l’adultère sur la « toile ». Elle dénonce l’illusoire, la goujaterie et la lubricité de ces sites de rencontres adultérins, ou la femme et l’homme deviennent de simples objets de consommation. « L’extraordinaire, l’extraordinaire…Voilà ce qu’internet nous propose. Voilà le vrai mensonge et le vrai danger. » Et Martine S. de conclure : « Tout cela c’est virtuel, c’est du rien. »

Martine est sur Gleeden

Auteur : Martine S.
Editions : Editions de La Martinière

stadePar Félix Brun - Lagrandeparade.fr / Stade est la fiction d’une société sans pitié pour les rebus, les rejetés, les sans grades, les sans domicile, les sans travail, ceux qui font tâche dans le monde idéal imaginé par les politiciens et ceux des "grandes écoles". Nous avons grandi avec la conviction que la politique est faite pour aider les gens à vivre mieux….sans penser que les gens en question sont les hommes politiques eux-mêmes. Voilà un roman d’actualité qui apporte une solution pleine d'humour corrosif au chômage et à la présence des SDF : un simple stade devient un univers concentrationnaire adapté qui organise l’autodestruction des chômeurs et des sans-abris, devenus, l’espace d’une rencontre, supporters d’une des deux équipes de football qui s’affrontent à la mort…avec son lot de résistants, de héros, de sensibilité, de corruption, d’amour.
L’écriture de Pierre Jourdan est simple, sans fioriture ni emphase; son style direct, un peu maladroit parfois. Un livre surprenant toutefois, engagé et engageant, qui tient le lecteur en éveil jusqu’au point final ; Pierre Jourdan nous livre une vision acide mais lucide d’une société en proie à ses pires contradictions….A suivre.

Stade
Auteur : Pierre Jourdan
Editions : Persée

 

danslesecretPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr / Antoine est le propriétaire d'un bar en Corse. Chaque nuit, il rejoint au lit son épouse Lucille, depuis longtemps endormie, et s'octroie parfois le droit de la réveiller pour jouir de son corps qu'il vénère. Tous deux ont une fille, Agathe, un rayon de soleil d'intelligence et de douceur, et un fils, Joseph, capricieux et impatient. Une nuit, après qu'Antoine ait fait l'amour à Lucille, cette dernière lui "dit quelque chose en souriant, d'une voix pleine d'amour et d'abandon, quelque chose qu'elle articula avec une netteté parfaite mais qu'il lui sembla pourtant ne pas avoir compris. Elle se rendormit tout de suite." Cette petite phrase va hanter Antoine...parce qu'elle trahit peut-être l'infidélité de son épouse. Être pétri de paradoxes, ce barman qui, presque tous les soirs, succombe à la chair facile des clientes, n'accepte pas de son côté l'idée que Lucille puisse avoir une sexualité qui s'épanouisse en dehors du cadre vertueux du mariage. C'est l'heure des remises en question pour Antoine et de l'effondrement de l'hypocrite système sur lequel reposait son existence. Il se rapproche alors de son frère cadet, Paul, écorché vif qui vit retiré dans la maison de village familiale, toujours entre deux verres.
Jérôme Ferrari a une écriture aussi puissante que violente. Il ne ménage pas ses personnages et aborde avec pertinence les thématiques de la filiation, des héritages familiaux, de la culpabilité et de l'innocence et du pouvoir toxique de notre imagination. Structuré en chapitres qui varient les points de vue et les époques, Dans le secret est un roman de qualité qui rappellera à certains le portrait somptueux de la complexité humaine que l'on ne peut qu'applaudir dans " Où j'ai laissé mon âme".

Dans le secret
Auteur: Jérôme Ferrari
Éditions: Actes Sud- Babel
Parution: 2010

salman rushdiePar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Sur le plateau de la chaîne télé américaine CBS en soirée de ce dimanche 14 avril, le journaliste déclenche le minuteur de son téléphone portable. Fin du silence vingt-sept secondes plus tard.

Lire la suite : « Le Couteau » de Salman Rushdie : violence, amour et écriture…

AusterPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Pour le grand romancier japonais Haruki Murakami, aucun doute : « Paul Auster est un génie ! » Pour la comédienne et écrivaine française Irène Jacob, il est « cet ‘’Homme qui marche’’ de Giacometti.

Lire la suite : « Baumgartner » de Paul Auster : le roman à remonter le temps

cixinPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Trois suggestions de lecture pour une semaine. D’abord, on commence avec le Chinois Liu Cixin, écrivain star entre science-fiction et fantastique ; on enchaîne avec l’écrivain américain Ta-Nehisi Coates pour la réédition d’un texte puissant en forme de lettre à son fils, et on boucle la semaine avec l’Islandais Arnaldur Indridason, un des meilleurs auteurs de polar contemporains pour une cinquième enquête de son héros flic retraité et obsédé par le passé… Bonne lecture !

LIU CIXIN : « L’ère de la supernova »

Pas moins de vingt et un ans aura-t-il fallu attendre pour enfin lire « L’ère de la supernova », le livre de Liu Cixin écrit en 2003.. Ancien ingénieur dans la centrale électrique de Yangquan (nord-est de la Chine), il est outre-Atlantique un des auteurs préférés de Barack Obama et d’Elon Musk, et également la coqueluche de la Silicon Valley et de Netflix. Maître en science-fiction et fantastique, il imagine cette fois un funeste corps céleste, né voilà cinq cents millions d’années sous la forme d’une étoile inconnue de la constellation du Cocher qui va finir ses jours en une spectaculaire explosion d’énergie. C’est une supernova, et son explosion va déclencher des radiations jusque sur la Terre. L’ADN de la population terrestre est irrémédiablement anéanti- sauf celle des enfants de moins de 13 ans. Ainsi, ils sont les seuls survivants de leur espèce, et très vite, vont accéder au pouvoir- les adultes, se sachant condamnés, s’empressent de leur transmettre la totalité de leurs connaissances et savoirs. Dès lors, va se poser une question- essentielle : cet héritage va-t-il suffire et satisfaire cette jeunesse immature ? Et d’autres questions comme : que vont-ils faire de ce monde qu’ils rêvent basé sur le jeu ? en cette ère de la supernova, sauront-ils éviter la guerre ?

L’ère de la supernova
Auteur : Liu Cixin
Editions : Actes Sud
468 pages
Prix : 24 €

 

coatesTA-NEHISI COATES : « Entre le monde et moi »

Lors de la parution originelle outre-Atlantique en 2015 d’« Entre le monde et moi », l’auteur journaliste fut immédiatement qualifié de « chroniqueur de la rupture radicale entre noirs et blancs aux Etats-Unis » et reçut le National Book Award (catégorie non-fiction). Le livre, sous-titré « Lettre à mon fils » (qui avait, lors de la première parution, 15 ans) reparaît en ce début 2024 dans une nouvelle traduction et une préface inédite de l’auteur. Plus que jamais, « Entre le monde et moi »- titre inspiré par les mots du poète américain naturalisé français Richard Wright (1908-1960), démonte le mécanisme du racisme. Nombre d’auteur.e.s- sous la couverture de polémiste- se seraient laissés aller à une colère mal maîtrisée- il est différemment avec Ta-Nehisi Coates. Son écriture est vive, cinglante, coupante et rapeuse. Jeune homme, il a découvert les écrits de Malcolm X, ne s’est pas remis de la mort de son copain de fac Prince Jones- fils de médecin et tué par un policier… A l’âge d’homme, il pense toujours à la phrase de son père : « Si ce n’est pas moi qui te bats, ce sera la police ». Aujourd’hui, dans l’Amérique du Black Lives Matter et du spectre d’un possible retour de Donald Trump, il confie : « En grandissant, j’ai appris qu’il y avait effectivement de bonnes raisons d’avoir peur… »

Entre le monde et moi
Auteur : Ta-Nehisi Coates
Editions : Autrement
208 pages
Prix : 19 €

 

islandeARNALDUR INDRIDASON : « Les Parias »

On plonge dans le noir. On s’offre pour guide un maître du clair-obscur. Rien moins que le meilleur auteur islandais de polar, à savoir Arnaldur Indridason, à ce jour 18 millions d’exemplaires vendus dans le monde et traduit en 40 langues. Ces temps-ci, il nous envoie « Les Parias », la cinquième enquête de son flic retraité Konrad. Il ne peut s’empêcher de se mêler des enquêtes en cours, surtout si elles ont un lien avec le passé. Alors, quand une veuve se pointe à la police scientifique avec un pistolet- un Luger, il se lance dans l’enquête : l’arme aurait appartenu au mari défunt et a servi pour un crime commis en 1955. Konrad est obsédé par le passé (« dans sa carrière, il ne s’était jamais intéressé aux enquêtes irrésolues »), par l’énigme de son père assassiné- tant qu’il n’aura pas résolu le mystère, il sera habité par la colère et la vengeance. On plonge dans l’Islande des années 1960, c’est le temps de l’inflation, de la précarité, de la chasse aux homosexuels, des yeux fermés sur les agissements des pédophiles, des trafics, des flics corrompus et sans morale- c’est le temps des parias. Le temps d’une Islande sans scrupules… Et d’une écriture fluide, dans les de Konrad, Arnaldur Indridason signe un roman furieusement noir, entre passé et présent.

Les Parias
Auteur : Arnaldur Indridason
Editions : Métailié
304 pages
Prix : 22,50 €

 

 

Par Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Avant la rentrée littéraire d’hiver programmée pour le 4 janvier 2024, il est encore temps de rappeler les temps forts de l’année qui tire à sa fin. Ainsi, lagrandeparade.com présente sa sélection (revendiquée totalement subjective !) des dix meilleurs romans et récits étrangers parus en 2023. Bonne lecture à toutes et tous !

 

LE PODIUM

« Matrix » de Lauren Groff
Après « Les Monstres de Templeton » (2010), « Arcadia » (2012) et surtout « Les Furies » (2017, livre préféré de Barack Obama), l’Américaine Lauren Groff fait à nouveau sensation. Avec « Matrix », c’est un sacré plongeon dans le temps : l’an 1158 avec une héroïne de 17 ans, Marie de France. Première femme à avoir écrit en français, elle demeure une jeune femme au destin immense, à la magie visionnaire. Ainsi, « elle sort de la forêt seule sur son cheval. Agée de dix-sept ans, dans la froide bruine de mars, Marie qui vient de France. An de grâce 1158, le monde attend avec lassitude la fin du carême. Bientôt ce sera Pâques, elle approche de l’abbaye, « pâle et hautaine au sommet d’une butte dans cette vallée humide où les nuées venues de l’océan se tordent contre les collines ». Née d’un viol, Marie est une bâtarde envoyée au couvent par la reine Aliénor. Amoureuse contrariée, manipulatrice géniale, « femme puissante » visionnaire, de l’abbaye elle fait une véritable entreprise, avec un atelier de copistes. La « petite bâtarde » a pris sa revanche- ne serait-ce qu’une illusion ?

« Matrix »
Auteure : Lauren Groff
Editions : L’Olivier

« La Cité de la Victoire » de Salman Rushdie
Grand amateur de textes-épopée comme le « Râmâyana », le « Mahâbhârata » et l'« Iliade » d'Homère, Salman Rushdie avait bouclé son nouveau roman- « La Cité de la Victoire », peu avant l’attaque dont il fut victime en août 2022 et qui l’a privé d’un œil de l’usage d’une main. Dans ce texte, le lecteur se retrouve à Bisnaga. Après une bataille « ordinaire » entre deux royaumes, une fillette de 9 ans, Pampa Kampana, assiste à la mort de sa mère, brûlée dans le bûcher des veuves. Peu après, envahie par le chagrin, elle fait une rencontre divine : sa vie va être bouleversée. Pampa reçoit des pouvoirs exceptionnels de la déesse, qui lui glisse qu'elle va contribuer à l'essor de Bisnaga (littéralement, « cité de la victoire »). Pendant les 250 années suivantes, les destins de Pampa Kampana et de Bisnaga se confondent. Pampa va bousculer la société, installer une autre approche de la vie commune... et fera des femmes les égales des hommes. En maître du conte, Rushdie y ajoute le texte de deux voyageurs portugais, marchands de chevaux, racontent tout de la vie quotidienne, les marchés, les rituels dans les temples…

« La Cité de la Victoire »
Auteur : Salman Rushdie
Editions : Actes Sud

« Feel Free » de Zadie Smith
On la dit écrivaine transatlantique. Look éternel de mannequin, née d'un père anglais et d'une mère jamaïcaine, Zadie Smith est une autrice parmi les plus brillantes et inventives de l'époque, jamais aussi lumineuse que lorsqu’elle est en période d’essais. Le recueil « Feel Free » est composé d’« essais à vocation libre », de textes écrits « en Angleterre et aux États-Unis pendant les huit années de la présidence Obama pour la plupart », soit entre 2009 et 2017. Zadie Smith ne manque pas de préciser que ces textes font « désormais partie d'un monde englouti » Au meilleur de son art, elle écrit aussi : « On ne combat pas le feu avec de l'air. Mais on ne peut se battre pour une liberté qu'on ne sait plus identifier. À un lectorat toujours avide de liberté, je propose ces textes afin qu'ils soient utilisés, modifiés, démantelés, détruits ou ignorés, c'est selon ! » Et c'est ainsi qu'elle réfléchit en toute liberté, aussi bien sur cette vie dont la finalité est de créer des liens, sur l'art de la danse que sur les réseaux sociaux ou les jardins italiens. Du grand art !

« Feel Free »
Auteure : Zadie Smith
Editions : Gallimard

ET AUSSI

« Trust » de Hernan Diaz
Pulitzer de la fiction, Hernan Diaz embarque, avec « Trust », ses lecteurs à Wall Street dans les années 1930. La Grande Dépression a frappé. Quelques malins ont su faire des affaires. Nombre d'États-Uniens ont vu leur fortune s'évaporer, d'autres ont prospéré dont cet héritier d'une famille d'industriels devenu magnat de la finance : lui et son épouse, fille d'aristocrates, forment un couple qui fait envie à la « high society » locale. Froid et calculateur, Benjamin Rask fait tourner l'entreprise ; fragile et mélancolique, Helen s'occupe de la maison et de ses bonnes œuvres…

« Trust »
Auteur : Hernan Diaz
Editions : L’Olivier

« Faire Face » de V- Eve Ensler
Auteure de nombreux essais et textes dont « Les Monologues du vagin », l’Américaine Eve Ensler a décidé de changer de patronyme. Ainsi, sous son nouveau nom- V, elle signe « Faire face », son autobiographie. Un texte éclaté, sans contrainte chronologique mais par thèmes. Huit chapitres : Murs, Sida, Faim d'une mère, Féminicide, Le Chagrin, Tomber, Peau, Prendre acte, et enfin, Un épilogue. Un texte constitué d'extraits, d'articles de presse, de pièces en vers, de quelques images… Des mots d’action et de lutte(s) pour dire et écrire l'intime d’une femme, l'universel de toutes les femmes.

« Faire Face »
Auteure : V- Eve Ensler
Editions : Denoël

« Les Armes de la Lumière » de Ken Follett
A 74 ans, le grand maître du roman historique a décidé de boucler « Kingsbridge », sa saga best-seller mondiale. Avec « Les Armes de la Lumière », le Britannique Ken Follett a ainsi posé la dernière pierre à son œuvre. Mieux : il propose un véritable feu d’artifice, et y fait sa révolution. Avec un récit qui court de 1792 à 1824. Tout y est : le féminisme, la révolution industrielle, le capitalisme… C’est un formidable maelström, avec une révolution industrielle, des guerres napoléoniennes et la bataille de Waterloo. Avec Follett, c’est épopée à tous les étages !

« Les Armes de la Lumière »
Auteur : Ken Follett
Editions : Robert Laffont

« Les Naufragés du Wager » de David Grann
Journaliste au « New Yorker », David Grann murmure à l'oreille d'Hollywood. Martin Scorsese et James Gray ont adapté sur grand écran certains de ses livres. Et, avec Leonardo DiCaprio, Scorsese a acquis les droits ciné de sa nouvelle livraison : « Les Naufragés du Wager ». Une fois encore, David Grann mêle journalisme et fiction. Dans ce livre (cinq ans de travail !), l'auteur plonge en 1740. Le Wager, navire britannique, est envoyé pour récupérer les trésors d'un galion espagnol et échoue au Cap Horn. Des naufragés se réfugient sur une île. Mutineries et cannibalisme au programme !

« Les Naufragés du Wager »
Auteur : David Grann
Editions du Sous-Sol

« Babysitter » de Joyce Carol Oates
Hier appelée Motor City, car capitale mondiale de l'industrie automobile, la ville de Detroit est devenue Murder City. La cité du crime. Dans sa banlieue vit Hannah, l'héroïne du nouveau roman de Joyce Carol Oates. Une fois encore, l'auteure à la production étourdissante nous envoie, à 85 ans, un roman empli d'effroi à tous les étages. Que sait-on vraiment d'Hannah ? Mariée à un homme d'affaires, elle s'ennuie et tente d'organiser au mieux la vie de sa famille. Va se présenter à elle un inconnu. Il lui a saisi le poignet lors d'un cocktail mondain- elle devine la violence chez « ce mâle prédateur enchanté de lui-même ». Et il devient son amant. Début d'une relation toxique. À la même période, un tueur d'enfants nommé « Babysitter » enlève, viole et tue de jeunes garçons blancs près de chez elle, et des voisins, haut placés chez General Motors, sont assassinés dans leur villa… Une fois encore, Joyce Carol Oates frappe fort. Elle à qui on promet le Nobel depuis tant et tant d'années reste la meilleure quand il s'agit d'ausculter l'Amérique d'hier et d'aujourd'hui.

« Babysitter »
Auteure : Joyce Carol Oates
Editions : Philippe Rey

« Jeux sur tambours et tambourins » d’Olga Tokarczuk
Prix Nobel 2018, Olga Tokarczuk est tenue comme la meilleure des écrivains polonais contemporains. À 60 ans, elle est saluée pour la version française de « Jeu sur tambours et tambourins », recueil de 19 nouvelles paru à l'origine en 2001, complété de son premier recueil, « L'Amour et autres nouvelles ». Nous voilà plongé.e.s dans le laboratoire narratif d'une auteure qui assure : « La nouvelle est l'une des formes achevées de la littérature, c'est elle qui exige le plus d'efforts et d'inventivité ». En ouverture de ce menu de grand choix, « Ouvre les yeux, tu n'es plus en vie ! ». C. est une lectrice, fan de romans policiers. Elle trouve alors le moyen d'intervenir dans l'intrigue, beaucoup trop molle à son goût, du mauvais polar qu'elle a commencé… Et comme il n'y a pas de meurtre, alors C. intervient et, assassine ! Les autres nouvelles sont du même niveau. Olga Tokarczuk revendique une littérature où tout est permis, entre fantasmes et doubles qui hantent le texte. Jouez tambours, sonnez tambourins !

« Jeux sur tambours et tambourins »
Auteure : Olga Tokarczuk
Editions : Noir sur Blanc

« Sale menteuse » de John Waters
Le « dandy trash » a encore dépassé les bornes ! A 77 ans, réalisateur et acteur, l'Américain John Waters signe « Sale Menteuse », un premier roman parmi les plus furieusement déjantés de l’année… et a confirmé qu’il est bien le pape du mauvais goût ! Avec « Sale menteuse », on est servi : l’héroïne, Marsha Sprinkle, est voleuse pathologique et arnaqueuse de génie et ne compte plus ses ennemis. Qui ont décidé de lui régler son compte. Mais elle est intelligente, incroyablement fourbe et celui qui l'attrapera n'est pas encore né ! Le (très) mauvais goût érigé en art.

« Sale menteuse »
Auteur : John Waters
Editions : Gaïa

torPar Félix Brun - Lagrandeparade.com/ Tor est un village fantomatique, quelque part dans les Pyrénées Catalanes proche d’Andorre…perdu au milieu des montagnes, déserté, enfoui sous la neige avant la fin de l’automne, ici les loups ce sont les hommes.

Lire la suite : TOR : Trois crimes sur la montagne maudite 

giocondaPar Félix Brun - Lagrandeparade.com/ Une belle surprise attend le lecteur de ce recueil aux textes puissants et lumineux, aux thèmes et aux écrits hétéroclites : une fable ( Le chat et la souris) ; plusieurs histoire provinciales ( Le vieil homme et l’étrangère, L’enterrement de ma tante, Vendredi saint) ; des récits intimistes ( Nondas ou la révolte du médecin, La maison qui pleure) ; une scène onirique (Tulipes) ; des nouvelles fantastiques (L’ultimatum, Randonnée équestre à l’intérieur des terres en Inde) ; et enfin un libretto sur le thème de son précédent roman Gioconda.

Lire la suite : Le vieil homme et l’étrangère : un recueil de textes lumineux 

fracasPar Félix Brun - Lagrandeparade.com/ Shippagan au Québec…Anjan et Nat forment un couple fusionnel qui a donné naissance en juillet 2013 à Raphaëlle. Tous trois sont paisiblement installés au Canada dans la quiétude et le confort d’une famille soudée. Anjan est correspondant de guerre :  "L’écriture était un métier simple, c’est en partie pour cette simplicité et l’indépendance qu’elle m’offrait que je l’avais choisie." 

Lire la suite : FRACAS :....dans la lignée des grands journalistes de guerre !

folettPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Gallois de Cardiff, il apprécie par-dessus tout les pavés. Surtout ceux que, depuis les premières années 1970, il envoie en librairie !

Lire la suite : « Les Armes de la lumière » de Ken Follett : fin de série…

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