Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ Benjamin Prade a 16 ans. Élève en seconde au lycée Simone Weil, il habite seul avec sa mère, en pleine dépression depuis que son père s’est installé en Argentine avec une nouvelle femme, bien plus jeune. Passionné de skate et de jeu vidéo, il partage son temps entre l’école, s’occuper des courses et de la vie quotidienne, jouer en ligne avec son amie Djamila, une jeune femme boulangère qui est comme une grande sœur pour lui, et ses amis d’enfance, Enzo et Taïeb. Enzo accumule les aventures sexuelles, tandis que Taïeb désespère de trouver une copine, tout en essayant d’échapper à la surveillance de son frère aîné, devenu très religieux.

Benjamin croise le chemin d’Alicia, une élève de première dont il tombe éperdument amoureux. Alicia est engagée, féministe, adepte du slow love. Benjamin, que les débauches virilistes laissent de marbre, est toutefois partagé entre son côté rêveur romantique et ses pulsions adolescentes. Il se sent, il se sait différent de ses amis, et l’angoisse qui l’envahit parfois est le fruit de cette différence et d’une vie quotidienne qui n’a rien de simple. Parce qu’il est sensible, parce qu’il ne pense pas qu’à coucher avec la première fille disponible, les autres le croient gay. Pourtant, il est juste un garçon hétéro, qui « n’a pas les couilles sur la table Â» !

La narration qui retranscrit les pensées du jeune homme permet une immersion immédiate dans son univers. L’autrice retrace ainsi non seulement son vécu, mais ses échanges de SMS et de messages WhatsApp, ses conversations avec ChatGPT – qu’il utilise beaucoup pour tenter de trouver des réponses à ses questionnements. Parce qu’il n’y a guère d’adulte de confiance autour de lui (hormis la documentaliste, un beau portrait d’enseignante sensible et intelligente).

L’humour est omniprésent dans un récit rythmé, qui retranscrit fidèlement les émois adolescents : obsession pour le sexe de certains, délires masculinismes d’autres, discours stéréotypés des cours de récré ou des vestiaires, insultes homophobes et déchaînements des réseaux sociaux.

La rencontre d’Alicia et de Benjamin est une bouffée d’oxygène dans ce tourbillon des émotions adolescentes. La délicatesse avec laquelle l’autrice décrit cette exploration de l’amour, la tendresse des sentiments qui lient ces deux jeunes, sans écarter pour autant la réalité du corps et du désir, est une ode à la découverte de soi et de l’autre. Dans l’attente et le partage, on apprend à s’apprivoiser, à se connaître, la rencontre n’en est que plus belle.

Le ton est toujours très juste et Julie Rey parvient à nous faire ressentir les émois, les doutes, les fragilités, mais aussi les forces de ses personnages. Benjamin est à la recherche de quelque chose de beau dans sa vie, et il va le trouver avec Julie, malgré leurs différences – grâce à leurs différences ?

Quelque chose de beau 
Autrice : Julie Rey
Éditions : École des Loisirs
Collection : Médium +
Parution : 3 septembre 2025
Prix : 17 €
À partir de 13 ans