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Jefta van Dinther : The Quiet, « A sense of listening »

  • Écrit par : Julie Cadilhac

JeftaPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.com/ Chef de file d’une nouvelle vague chorégraphique nordique, Jefta van Dinther, de nationalité suédoise, chorégraphe et danseur, travaille aujourd’hui entre Stockholm et Berlin. Il fait du corps en mouvement, le centre de son propos, soigne la mise en scène et fait interagir le corps avec la lumière, les sons et divers matériaux.

Ses danseurs répétent au travers de différents environnements et ces processus travaillés deviennent des performances sur scène. Il a signé des chorégraphies diverses : IT’S IN THE AIR (2008), The Way Things Go (2009), Kneeding (2010), The Blanket Dance (2011), GRIND (2011), THIS IS CONCRETE (2012), Plateau Effect (2013), As It Empties Out (2014), Protagonist (2016) et Dark Field Analysis (2017). Dans The Quiet, cinq femmes sur le plateau pour évoquer de manière tangible le passage des générations et ses héritages, la question du temps. Rencontre avec un artiste engagé et ouvert sur le monde. 

[bt_quote style="default" width="0"] Je défends une dramaturgie qui prend en compte le corps et ses logiques.[/bt_quote]

The Quiet est-il né de l’envie d’inviter les gens à se ré-approprier le temps…après lequel la société moderne nous force toujours à courir?
Au départ, le projet a débuté avec le désir de renouer des liens avec des personnes qui avaient joué un rôle important dans ma propre trajectoire artistique et personnelle. Des personnes qui ont été des "guides" influents pour moi, en m'aidant et en m'accompagnant dans mon développement en tant qu'artiste. En effet, c’est vrai que j’avais travaillé avec de jeunes danseurs auparavant et que j’avais aussi créé quelques spectacles pour hommes. Ici, avec The Quiet, je souhaitais avoir plusieurs générations sur la même scène et aussi traiter concrètement de questions tangibles à propos de ce dont nous héritons, ce qui est transmis de génération en génération. Quelque chose de plus lent, de plus doux, de plus modeste en est ressorti.

[bt_quote style="default" width="0"]Here, with The Quiet, I was interested in having many generations on the same stage, and also to to somehow concretely deal with questions of what it is that we inherit, what it is that is passed on between generations. Something slower, softer, more reduced appeared out of that. [/bt_quote]

Votre création cherche-t-elle à nous réveiller en rappelant que le passage des générations, la tradition orale et la transmission ne peuvent se concrétiser que dans les formes souvent négligées du temps - où l’on prend son temps, passe le temps, perd son temps…?

Nous travaillons en effet sur des processus lents dans The Quiet. Tout au long de la performance, des motifs apparaissent continuellement. Ils sont en train d'être formés, ils sont en train d'être suivis, ils sont en train d'être cassés. Mais ça prend du temps. Ces schémas sont physiques, mentaux, psychologiques, spatiaux, voire cosmiques. La performance met en scène cinq femmes de trois décennies différentes, âgées de 40 à 61 ans. Elles ont un lien, mais elles sont aussi elles-mêmes guidées à travers le paysage de cette performance et de ce monde de la scène par quelque chose d'autre: une sorte de vocation. En participant à divers rituels, elles voyagent et se rassemblent, et sont à la disposition de quelque chose d'extérieur à elles-mêmes, qui leur montre en quelque sorte le chemin.

[bt_quote style="default" width="0"]We are indeed working around slow processes in The Quiet. Throughout the performance, patterns continuously appear. They are being formed, they are being followed, they are being broken. But it takes time. These patterns are physical, mental, psychological, spatial, at some point even cosmic. In the performance there are five women on stage, from 3 different decades, ranging from 40 - 61 in age. They have a bond, but they are also themselves guided through the landscape of this performance and this stage-world by something else: a kind of calling. In engaging with various rituals, they travel and congregate, and are "provided for" by something outside of themselves, that in some sense shows them the way.[/bt_quote]

The QuietComment, concrètement sur le plateau, avez-vous travaillé cette idée-concept?
La scénographie est une sorte de chambre ou de maison Dogville-esque avec seulement les contours clairement définis. Elle fournit un intérieur et un extérieur et s'avère liée, dans un certain sens, aux notions de mémoire. Les murs ne sont pas là, pas plus que le toit, et les surfaces que nous voyons en tant que public sont des surfaces à remplir, à projeter. Un peu comme lorsque nous entrons dans un espace où nous avons ét" auparavant mais que nous ne pouvons plus nous en souvenir, il y a un processus de voyage dans le temps afin de nous souvenir, il y a une présence mais aussi une absence, dans la mesure où nous devons quitter l'ici et maintenant afin d'être quelque part ailleurs dans le temps. Dans The Quiet, nous travaillons sur l'incarnation de cette vacance, ou avec l’idée d’être ailleurs, ainsi que sur la perte de mémoire, sur le fait d’être à la fois dans le passé, le présent et l’avenir.

Parlez-nous des cinq interprètes femmes de ce spectacle? Comment et pourquoi les avez-vous choisies?
D’abord pour les raisons que je vous ai évoquées avant. La plupart des interprètes de The Quiet ont été également, à un moment donné, mes supérieures. Elles me fournissaient des possibilités de travail et des relations. Certains d'entre elles étaient mes "boss".

On peut lire que votre travail s’apparente moins à une chorégraphie aboutie qu’à une succession d’actions sereines où l’expression des visages est aussi importante que le corps…la danse contemporaine use depuis quelques années de nouvelles formes d’expression, semble presque refuser la «danse »au sens classique sur le plateau…pourquoi selon vous? Parce que la danse amène avec elle l’idée de performance, d’endurance et de spectaculaire qui empêche d’explorer des pistes plus « intellectuelles »?
Je ne pense pas que mon travail refuse en aucune manière la danse et je ne considère pas cela comme un sujet très actuel (encore plus dans les années 1990 ou 2000). Au contraire, je pense que l'on pourrait très bien décrire ce que je fais en termes de "mouvement dans le temps et dans l'espace", qu'il s'agisse de mouvements de corps, de matériaux, de lumières ou de sons. Je travaille cependant très clairement avec le "corps quotidien": le corps qui se rapporte à la vie quotidienne, au corps de chacun, à la chorégraphie que nous voyons en dehors de la danse professionnelle, dans les rues et les parcs, à la maison ou ailleurs. Je suis intéressé par la façon dont les gens peuvent se sentir concernés et s'identifier avec les corps sur scène et au contraire, ne pas s'identifier du tout ; les deux postures en même temps m'intéressent. Comment il y a quelque chose de clairement reconnaissable dans ces corps et dans leurs engagements, mais où en même temps il y a quelque chose qui ne va pas chez eux, de sorte que nous pourrions avoir une autre expérience de nous-mêmes en les voyant.

[bt_quote style="default" width="0"]I work however very clearly with the "quotidian body": the body that relates to every day life, to every person's body, to the choreography we see outside of professional dance, in the streets and parks, in the homes or elsewhere out there. I am interested in how people can relate to and identify with the bodies on stage and not, both at the same time. How there is something clearly recognisable in those bodies and their undertakings but where at the same time there is something off about them, with the result that we might have another experience of ourselves by seeing them.[/bt_quote]

Quel type d’art vivant défendez-vous, Jefta van Dinther? Qu’aimez-vous voir sur un plateau?
Je défends des œuvres d'art qui font en sorte que les performers soient le vecteur au travers duquel nous pouvons faire l'expérience de quelque chose en tant que public. Je défends des oeuvres d'art qui utilisent toutes les composantes de ce que signifie être une personne (physicalité, psychologie, émotivité, imagination, etc.) dans un corps dansant sur scène. Je défends une dramaturgie qui prend en compte le corps et ses logiques.

[bt_quote style="default" width="0"]I defend a dramaturgy that takes the body and its logics into consideration.[/bt_quote]

Enfin…quelle impression souhaiteriez-vous laisser au public suite à sa découverte de Quiet?
Un certain sens de l’écoute.

The Quiet
Chorégraphie et direction : Jefta van Dinther
Créé et interprété par : Linda Adami, Alexandra Campbell, Lisa Drake, Cecilia Roos, Agnieszka Dlugoszewska, Kristine Slettevold
Lumières : Minna Tiikkainen
Décors et costumes : Cristina Nyffeler
Son : David Kiers et Slowdive (pour Falling Ashes)
Voix : Lisa Drake
Texte : Jefta van Dinther, Alexandra Campbell, Lisa Drake, Cecilia Roos et Mandoline Whittlesey
Assistant chorégraphie : Thiago Granato
Conseil artistique : Gabriel Smeets
Coordination technique : Bennert Vancotttem
Technicien son : Stephan Woehrmann
Merci à Anna Grip et Pia Krämer

Production : Jefta van Dinther
Manager Emelie Bergbohm / Bohm Bohm Room
Responsable de production : Annie Schachtel
Distribution : Key Performance
Administration Interim kultur AB (svb) et HAU Hebbel am Ufer (Berlin)
Coproduction : Festival Montpellier Danse 2019, HAU Hebbel am Ufer (Berlin), Norrlandsoperan Umeå, Riksteatern Sweden, Dansehallerne Copenhagen, ICI-Centre choréographique national de Montpellier Occitanie direction Christian Rizzo, Tanzquartier Vienna, Sadler’s Wells London, PACT Zollverein Essen, CCN Orléans, Theater Freiburg, Julidans Amsterdam

Avec le soutien du Swedish Arts Council, City of Stockholm and HKF Hauptstadtkulturfonds (Berlin)
Avec le soutien de O Espaço do Tempo Montemor-o-Novo, BUDA Arts Centre Kortrijk, Swedish Embassy in Portugal, The Swedish Arts Grants Committee

Le site de l'artiste 
The Quiet ©Ninja Hanna

Dates et lieux des représentations: 

- Les Ven. 28 et Sam. 29 Juin à 18h au Théâtre la Vignette - Université Paul-Valéry Montpellier 3, Avenue du Val de Montferrand, Montpellier - FESTIVAL MONTPELLIER DANSE

- Les 6 et 7 juillet 2019 - Julidans Stadsschouwburg - Leidseplein 26 - Amsterdam - Autriche
- Le 18 octobre 2019 - Norrlandsoperan Umeå- Operaplan 5- Umeå - Suède
- Le 3 décembre 2019 - NEXT Festival Kortrijk- Schouwburgplein 14
Kortrijk- Belgique
- Les 12, 13 et 14 décembre 2019 - Tanzquartier Vienna - Museumsplatz 1- Vienne - Autriche
- Les 16, 17 et 18 janvier 2020 au Centre Pompidou- Place Georges-Pompidou - Paris- France

 


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