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La tentation d'être heureux : un voyage drôle et tendre dans une Naples grouillante de vie, sur les pas d'un vieillard qu'on finirait bien par adopter...

  • Écrit par : Virginie Gossart

RomanPar Virginie Gossart - Lagrandeparade.fr/ Cesare Anunziata a vraiment tout pour attirer notre sympathie : un vieux grincheux de soixante-dix-sept ans qui déteste son état - et la vieillesse en général -, ronchonne à longueur de temps et ne ménage pas ses semblables, en particulier ses compères du troisième âge.

Comme l'Alceste du Misanthrope, Cesare cultive l'art et la manière de se rendre désagréable en disant tout haut ce que personne n'ose d'ordinaire formuler, au risque de choquer, créer le malaise ou attiser la colère.
Pourtant, le lecteur sent très vite que sous ces dehors bougons et cyniques se cache un coeur toujours prêt à aimer, à prendre des risques, à vivre. Un coeur encore jeune et férocement drôle, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et entend bien profiter des années qui lui restent pour manger, boire, fumer à sa guise, voire même prendre du bon temps avec une prostituée - chouette fille mais peu présentable.
Un vieillard au caractère bien trempé, à l'esprit toujours en éveil et au verbe volontiers irrévérencieux. Aussi habile à dire des vérités qu'à emprunter des masques pour se sortir de situations délicates ou dangereuses.
Mais n'a-t-il pas échoué dans son rôle d'époux et de père ? Ce mari autrefois volage a aujourd'hui des relations pour le moins tendues avec sa fille et son fils n'ose toujours pas lui avouer son homosexualité. Pour couronner le tout, Cesare semble détester rendre service à ses proches : amener son petit-fils à l'école est un plaisir pour la plupart des grands-père ; pour lui, c'est une corvée, voire une torture.
Pourtant, sa rencontre avec une jeune voisine –  qui lui rappelle un amour de jeunesse – va lui offrir l'occasion de se racheter : tout faire pour sauver Emma d'un mari violent et dangereux... Car sous ses airs de vieux blasé, Cesare est resté un idéaliste qui refuse de se rendre à la loi du plus fort. Et si le moment était venu de racheter ses erreurs passées ? Si cette femme en détresse était pour Cesare la dernière chance de faire le bien et de dévier le cours d'une existence devenue morne et sans saveur ?
Lorenzo Marone nous conte une histoire qui oscille très habilement entre drame et tendresse, cynisme et émotion. Ses personnages – Cesare en tête – ne sont jamais manichéens, ni complètement victimes, ni blâmables en tout.
Son récit se déploie comme une petite musique limpide, simple seulement en apparence, car chaque nouvelle page approfondit la richesse et la vérité de ses protagonistes. L'excellente traduction de Renaud Temperini y est sans doute pour beaucoup. On est très vite happés par les contradictions de ce personnage aussi touchant qu'horripilant, par la lucidité et l'humilité avec lesquelles sont abordés les thèmes de la solitude, de la vieillesse et des liens familiaux. Et Cesare nous accompagne très longtemps après la lecture de la dernière page, nous invitant à réinventer notre quotidien et nos rapports avec ceux que nous aimons : "On croit n'avoir besoin de personne jusqu'au moment où on s'aperçoit que plus personne n'est là. Et quand ça arrive, c'est un sacré bordel".

La tentation d'être heureux
Auteur : Lorenzo Marone
Traduit par Renaud TEMPERINI
Parution : le 01 septembre 2016
336 pages
Prix : 20€

 

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