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Bartleby : enquête sur l’altérité

  • Écrit par : Victor Waque

bartlebyPar Victor Waque - Lagrandeparade.com/ Le Théâtre Gérard Philippe accueille la pièce « Bartleby », adaptation de la nouvelle éponyme de Herman Melville. Texte toujours d’actualité, qui accompagne le spectateur dans des réflexions sur l’altérité, le monde du travail, l’impact de l’individu dans le collectif. Une pièce étrange, à la temporalité améliorable.

C’est l’histoire de Bartleby, simple employé de bureau, copieur de textes. Ce scripte travaille assidûment, nuit et jour. Un bon employé en somme. Très bon. Mais un individu fragile, introverti et solitaire. Son employeur l’apprécie pour la qualité de travail, et l’observe avec une sorte de compassion condescendante. L’employeur se rêve âme charitable et souhaite l’aider. Mais il se retrouve rapidement dans l’embarras, car Bartleby refuse de réaliser certaines tâches professionnelles. Il annonce son refus de sa petite voix timide, mais cela reste un refus, que le patron ne sait gérer. Les refus s’accumulent, impasse qui mène à un épuisement réciproque.
Sur scène, un open space d’aujourd’hui fait de tables en bois vernis et des dossiers volumineux nous plongent dans l’histoire. Le travail est au cœur de l’histoire. Les collègues de Bartleby sont représentés par des plantes vertes, qui ne servent à rien, sauf à copier du texte. Ce choix scénique centre le propos sur cette relation entre Bartleby et son employeur. Et cette impossible communication.
Le patron est admirablement joué par le comédien, Rodolphe Dana, à la fois empli de bonne volonté et perdu face à la réaction à tenir, perdu entre la mise en pratique de sa charité et les situations impossibles que cela entraîne pour lui. Il cherche à entrer en contact avec son employé, qui se referme systématiquement.
Chacun semble vivre dans son monde, imperméable l’un à l’autre. L’univers de Bartleby nous est étranger, inconnu, incompréhensible, pourtant bien là. Bartleby, joué de manière convaincante par Adrien Guiraud, timoré et doux, pauvre homme, dont la volonté semble pourtant inaltérable, une volonté qu’il exercice par la douceur et l’immobilisme. Deux poids qui semblent enrayer la mécanique de l’entreprise. Une désobéissance civile sans le savoir, car Bartleby ne revendique rien, sauf un désir qui lui est propre.
Ainsi, la pièce pose des questions importantes. Comment aider quelqu’un qui ne le souhaite pas ? Comment partager des espaces communs lorsque l’on est très différent ? Comment revendiquer ses convictions dans un monde qui ne les cautionne pas ? Une pièce conceptuellement intéressante, bien jouée, mais dont le rythme, lent, qui répète sous différentes formes l’incompréhension des deux hommes, traine parfois en longueur.

Bartleby
D’APRÈS LA NOUVELLE DE : Herman Melville
CRÉATION COLLECTIVE DIRIGÉE PAR : Katja Hunsinger et Rodolphe Dana

AVEC : Rodolphe Dana, Adrien Guiraud
TRADUCTION : Jean-Yves Lacroix
SCÉNOGRAPHIE : Rodolphe Dana
AVEC LA COLLABORATION ARTISTIQUE DE : Karine Litchman
LUMIÈRE : Valérie Sigward
SON : Jefferson Lembeye
COSTUMES : Charlotte Gillard
CONSTRUCTION DU DÉCOR : Éric Raoul
Bartleby, le scribe est publié aux éditions Allia.

Production : Théâtre de Lorient – CDN.
Coproduction : Scène nationale d’Albi ; Théâtre du Champ au Roy, scène de territoire, Guingamp.

Dates et lieux des représentations : 
- Du 1er au17 avr. 2022, du lundi au vendredi à 20h, samedi à 18h, dimanche à 15h30, relâche le mardi à la salle Mehmet Ulusoy - Théâtre Gérard Philipe ( 59, boulevard Jules-Guesde, 93 207 Saint-Denis Cedex)


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