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A Rome avec Nanni Moretti : Errance cinématographique dans la « ville éternelle »

  • Écrit par : Serge Bressan

MorettiPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Début du voyage, on entend et lit les mots d’Alberto Moravia : « Je n’ai jamais quitté Rome, mais à l’intérieur de la ville on peut dire que j’ai fait du chemin ». Et puis, montant sur une Vespa, on se dit aussi qu’il y a « encore quelque chose à découvrir »- comme le suggère le premier chapitre de l’excellent livre de Paolo di Paolo et Giorgio Biferali : « A Rome avec Nanni Moretti ». Les deux jeunes auteurs expliquent : « New York est-elle la même ville après un film comme « Manhattan » de Woody Allen ? Berlin, après « Les Ailes du désir » de Wim Wenders ? Rome, après « Journal intime » ? Une caméra ne laisse aucune trace tangible sur les lieux qu’elle filme et pourtant, de manière imprévisible et définitive, elle les transforme. Elle dessine de nouvelles cartes, inhabituelles, parfois impraticables, sous la forme d’un récit, d’une flânerie ou d’une émotion visuelle ». Alors, le cinéma devient, comme le définit Giuliana Bruno dans « Atlas of Emotion », un « moyen de transport »…

Et on s’offre un voyage en capitale. De film en film. Nanni Moretti, c’est à ce jour onze films de « Je suis un autarcique » à « Bianca », de « Journal intime » à « Mia Madre » en passant par « Habemus Papam ». On voit et revoit les personnages, on songe aux atmosphères, on entend les répliques devenues proverbes. Di Paolo et Biferali assurent : « On pourrait ainsi écrire une contre-histoire de Rome et de l'Italie des quarante dernières années à travers le prisme morettien. En s'intéressant d'abord au contenu des films, répliques cultes et « prophéties » involontaires, et au contexte social et politique dans lequel chacun d'entre eux est sorti, puis aux lieux de tournage et aux décors. La genèse de ce livre vient justement de cette idée, de cette tentative de cartographier les lieux romaines dans le cinéma de Moretti… » Par exemple, « Je suis un autarcique », sorti sur les écrans en 1976, c’est l’évocation du Canal Sant’ Angelo, Prati, Trieste, Castel Porziano ou encore Ostie… Avec « Bianca » (1984), on défile, Aventino, Monteverde (où vécurent Pier Paolo Pasolini et aussi Nanni Moretti), Monte Mario, on fait halte à la Villa Borghese… Avec « Journal intime » (1993), la Vespa nous promène, Gianicolo, Parioli, Garbatella, Prati, Spinaceto, Casal Palocco, Flaminio… Avec « Mia Madre » (2015), défilent Gianicolense, Flaminio, Prati, Africano, encore Monterverde…
Avec Nanni Moretti (né le 19 août 1953 à Brunico, dans le Trentin-Haut-Adige), c’est Rome ville ouverte… C’est tout Rome qui défile, coins et recoins jusqu’à la périphérie et même banlieue. Surnommée « ville éternelle », la capitale italienne inspire, irradie, illumine le cinéma de Moretti comme elle le fit, dans le passé, pour les films de Vittorio De Sica, Ettore Scola, Gianni Di Gregorio, Luciano Emmer, Pier Paolo Pasolini (« Mamma Roma ») ou encore Federico Fellini (« La Dolce Vita »). Dans « A Rome avec Nanni Moretti », Paolo di Paolo et Giorgio Biferali enchaînent les anecdotes, dessinent les contours de la ville, racontent les préparations des films « morettiens » (on y découvre un Nanni Moretti réalisateur follement à l’aise dans l’improvisation), invitent à l’errance, y ajoutent des plans de quelques quartiers et des photos de tournage. Insistent sur le plaisir à s’y promener au mois d’août quand elle est désertée. Et au fil des pages, on comprend combien, pour le réalisateur italien, la ville de Rome est à la fois l’intime et l’universel. Ce qu’il confirme, en fin de livre, dans un « entretien- conversation » aussi passionnant qu’éclairant et titré « Rome, ma mère » avec Paolo di Paolo et Giorgio Biferali, romanciers et essayistes. Un entretien qui, à l’image du reste du livre, est tout simplement un délicieux vagabondage urbain, un hymne à l’errance…

A Rome avec Nanni Moretti
Auteurs : Paolo di Paolo et Giorgio Biferali
Editions : Quai Voltaire
Parution : 23 mars 2017
Prix : 17,50 euros


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