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La forme de l’eau : une fantastique histoire d’amour, d’amitié, de révolte, pleine de rage, de poésie et de résistance !

  • Écrit par : Sylvie Gagnère

La forme de l'eauPar Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.fr/ 1963, au cœur de la Guerre Froide. Élisa Esposito travaille comme femme de ménage, de nuit, dans un centre de recherche aérospatiale. Muette, abandonnée par sa famille, elle a passé son enfance dans un orphelinat où elle a été victime de brimades et d’ostracisme.

Son univers se réduit à Giles, son voisin, un vieil homme un peu excentrique et solitaire, et Zelda, sa collègue noire, qui a appris la langue des signes pour communiquer avec elle et l’a prise sous son aile.
Une nuit, elle surprend quelque chose qu’elle n’était pas censée voir : un être amphibie est prisonnier du centre, où les scientifiques l’étudient pour tenter d’obtenir un avantage décisif sur les Russes dans la course à l’espace.
La créature est magnifique, et terrifiante. Elle fascine la jeune femme qui réussit à établir une communication avec elle grâce à la langue des signes.
Mais c’est sans compter avec Richard Strickland, le militaire qui a capturé l’humanoïde en Amazonie. Malgré sa brutalité et les tortures qu’il inflige, il n’apprend rien d’utile militairement parlant, et est donc bien décidé à faire disséquer le monstre. Il faudra aussi faire avec les Russes, qui s’intéressent de près à « l’atout » pour parvenir à le sauver.

L’étrange histoire d’amour entre une femme muette et une créature amphibie a donné un long-métrage qui a conquis le cœur du public et séduit les jurys de festival (Oscar du meilleur film, Lion d’or à la Mostra). Le roman, pensé par Guillermo Del Toro en même temps que son film, prolonge et approfondit les personnages et leurs liens.

Le récit démarre en Amazonie, où Richard Strickland a été envoyé pour capturer une étonnante créature amphibie, décrite par les autochtones comme un Dieu. Strickland est brutal, obsédé par son passé et les actes atroces qu’on l’a conduit à commettre lors de la guerre de Corée. L’extrême violence de ce soldat brisé est expliquée, ainsi que la relation fascination/haine intense qu’il éprouve envers la chose. Sa femme, qui s’efforce d’être une épouse et une mère modèle, découvrira elle aussi la face sombre de son mari et tentera de s’émanciper.

Les personnages secondaires, de Giles, le voisin solitaire, dont on comprend les raisons de la réclusion volontaire qu’il s’inflige, à Zelda, femme de ménage noire, qui a appris à survivre dans un monde régi par les blancs, en passant par le scientifique russe recruté par les services du KGB et contraint de vivre dans une paranoïa totale, sont formidablement traités et ont une profondeur qui les rend très attachants.

Le roman parle bien évidemment de la différence, et des difficultés que rencontrent ceux qui sont ainsi catalogués. Qu’ils soient monstre marin, femme, et même pire femme noire, homosexuel ou muet, toutes ces personnes souffrent du regard des autres et s’acharnent à se faire oublier pour s’en sortir. Mais par la grâce d’un « autre », encore plus différent qu’eux, ils trouvent des ressources insoupçonnées pour donner un sens à leur vie et réveiller l’espoir. Dans la solidarité, pour préserver l’amour et retrouver l’estime d’eux-mêmes, ils seront capables de braver tous les dangers.

Guillermo Del Toro et Daniel Kraus dépeignent parfaitement l’atmosphère de suspicion qui règne pendant la guerre froide, la chasse aux homosexuels, le racisme qui prévaut dans la société américaine, et le sort peu enviable des femmes dans un contexte très machiste.

Plein de poésie, tendre mais sans aucune mièvrerie, La forme de l’eau est une œuvre fascinante, un récit fantastique à l’intrigue haletante.

Le livre est un prolongement formidable du long-métrage, qui approfondit la psychologie des personnages, explicite leur personnalité, leurs manques et leurs dilemmes. La narration s’étoffe et prend une dimension encore plus forte.

Que l’on ait vu ou non le film, le roman se dévore, comme une magnifique histoire d’amitié, d’amour, comme un hymne à la tolérance et au respect des différences.

Cerise sur le gateau, les Éditions Bragelonne ont conçu une superbe couverture, et agrémenté l’ouvrage d’illustrations intérieures. L’objet-livre est aussi beau que son contenu !



La forme de l’eau
Auteurs : Guillermo Del Toro et Daniel Kraus
Éditeur : Bragelonne
Collection : Fantastique
Parution : 7 mars 2018


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