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Le vieil homme et la guerre - Tome 6, La fin de tout : une conclusion flamboyante pour un incontournable du space-opera

  • Écrit par : Sylvie Gagnère

la fin de toutPar Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ Au début de cette saga était la Terre, pourvoyeuse de soldats et de colons pour les FDC (Forces de défense Coloniale) qui pillaient allégrement le berceau de l’humanité, au nom de l’Union Coloniale, elle-même se prétendant représentante de cette même humanité. John Perry est passé par là, il a bouleversé tous les rapports de force, entre humains, bien sûr, mais également entre espèces extraterrestres (on en dénombre plus de 400, intelligentes), entre le Conclave et l’Union, bref, il a fichu un bazar total – et nécessaire. Dans le tome précédent (Humanité divisée), on avait vu apparaître un mystérieux groupe, bien décidé semble-t-il à alimenter les ressentiments de tous et à provoquer une guerre entre l’Union et le Conclave, entre la Terre et le Conclave, entre la Terre et l’Union. Les antagonismes entre ces différentes factions sont tels qu’elle pourrait bien réussir. Le lieutenant Harry Wilson et sa fine équipe de diplomates (dont on a fait précédemment la connaissance) vont devoir mettre en œuvre toute leur habileté pour éviter le pire, et La fin de tout ! Une précision tout de suite : il ne s’agit pas à proprement parler d’un roman, mais d’une série de novellas, dont la ligne directrice est commune. On commence avec La vie de l’esprit : « Salut. Je m’appelle Rafe Daquin et je suis un cerveau en boîte. » Le sujet pourrait être très sombre, et l’auteur l’a d’ailleurs abordé auparavant sur un mode plus tragique, mais Scalzi choisit ici de le traiter avec légèreté, notamment grâce à a personnalité de Daquin, qui manie avec finesse l’ironie. Le pilote un peu raté, ancien informaticien, trouve la parade pour échapper à ceux qui l’ont pris en otage et retourner contre eux la situation. En toile de fond, le lecteur découvre enfin la mystérieuse organisation qui œuvre en sous-main pour détruire le Conclave et l’Union. Le choix du traitement à la première personne est pertinent et permet de jouer avec le sujet, tout en offrant une identification forte. On peut d’ailleurs se rendre compte des avantages/inconvénients du choix narratif, avec la lecture de Une autre version de La vie de l’esprit, présentée en fin de recueil. Ce sont (quasiment) les mêmes péripéties, (quasiment) les mêmes personnages, mais l’angle narratif choisi est différent et donne un texte à la tonalité toute autre. Cette union fantôme célèbre (et dénonce les travers de) la diplomatie. Manœuvres politiques, faiseurs de guerres contre artisans de la paix, manigances en tout genre, et assemblée impuissante (clin d’œil à l’ONU ?), tout est prêt pour une confrontation sans merci. Le rythme est soutenu, l’intrigue solide et c’est très intelligent de parler par la voix du personnage principal extraterrestre, la conseillère du Général Gau. Résister au temps renoue avec la SF militaire, en suivant un groupe de FDC envoyé sur différentes missions, dont ils ne saisissent pas les tenants et les aboutissements (mais le lecteur, si, qui connaît le contexte). Une façon plaisante et originale de quitter les stratosphères diplomatiques pour aller au plus près de ceux qui participent/payent les décisions prises par les dirigeants. Le texte est drôle, et pose, mine de rien, d’intéressantes questions sur l’obéissance, la compréhension des enjeux, les prises de conscience et les interrogations des militaires de terrain. L’union ou le néant : la nouvelle qui clôt en beauté tout le cycle. Le complot intergalactique atteint son point culminant, la guerre semble inévitable, mais les super héros de la diplomatie vont jouer leur va-tout pour l’empêcher et sauver la paix. Le choix est simple – et terrible – : s’unir ou disparaître. Aventures, péripéties haletantes, intrigue bétonnée, la novella se lit avec délectation ! Chaque récit prend sa place dans la grande toile tissée depuis le départ par l’auteur et tout revêt son sens, grâce à ces histoires à plusieurs voix et points de vue. Scalzi revisite le space-opera avec l’humour dont il est coutumier, imbriquant scènes parfois foutraques et analyse politique et sociale. Il parle également de démocratie, de rencontres avec l’Autre, de la difficulté, mais aussi de l’impérieuse nécessité de se comprendre pour s’entendre. Les personnages ne sont jamais simplistes, y compris ceux issus des différentes races extraterrestres, dotés chacun d’une culture et d’une intelligence spécifique. Il réussit le pari de terminer en beauté ce cycle qui s’inscrit dans la (courte) liste des incontournables du space-opera, grâce à son style enlevé et plein d’humour, à ses personnages attachants, à son sens de l’intrigue parfaitement construite, mais aussi, et peut-être surtout, grâce à sa toile de fond, une brillante critique de l’impérialisme, du capitalisme et du militarisme, qui infuse tout au long de ses aventures, par ailleurs très divertissantes !

Le vieil homme et la guerre
Tome 6, La fin de tout
Auteur : John Scalzi
Éditions : Bragelonne
Collection : Science-fiction poche
Parution : 15 janvier 2020
Prix : 6,90 €

Humanité divisée : pour l’humour corrosif de Scalzi et une nouvelle plongée au cœur de l’univers du « Vieil homme et le guerre » – en attendant la suite !


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