Logo

« Big Bang » d’Irène Jacob : infiniment grand, infiniment petit…

big bangPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / On la connaît comédienne. Magnifique. Solaire. Elle a reçu, en 1991, le prix d’interprétation au Festival de Cannes pour son rôle dans « La Double vie de Véronique » du réalisateur polonais Krzysztof Kieslowski. On l’a vue non pas sauter à l’élastique dans le Vercors mais au théâtre dans des mises en scène de Katie Mitchell, Roland Auzet ou encore, ces temps-ci, Thomas Ostermeier. On l’a entendue chanter, elle a enregistré deux albums de bel effet- « Je sais nager » (2011) et « En bas de chez moi » (2016). On la retrouve, en cet automne, en librairies : à 53 ans, Irène Jacob publie son premier livre estampillé « roman » et titré simplement « Big Bang ». Un texte sur le bouleversement. Un livre bouleversant.

En ouverture, une citation du poète René Char : « Toi qui nais, tu appartiens à l’éclair ». « Big Bang », c’est le roman du début. De la fin, aussi. Un nouveau-né qui va arriver. Un être cher, le père, qui s’en va. C’est le roman d’Irène Jacob. Elle apprend qu’elle va être mère pour la deuxième fois alors que, peu avant, son père est parti. Bouleversements dans la vie de cette jeune femme, dans la famille. Enfant, Irène (le seul personnage qui conserve, dans le livre, son vrai prénom de la vraie vie) suit son père. A l’école, les petits copains et copines lui demandent ce que fait ce père. Elle répond : « Il cherche l’origine de l’univers ». Dans la vie de tous les jours, le père se prénomme Maurice ; dans le roman, c’est René- peu importe, dans les deux cas, il est chercheur au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), spécialiste de la physique quantique. Son job : chercher l’infiniment petit et l’infiniment grand, avec l’aide d’énormes machines que sont les accélérateurs de particules. Un jour, la petite fille questionne le père et lui demande ce qu’on cherche au CERN- il lui répond : « Ça ne se comprend pas facilement. Ce sont des recherches sur l’invisible ». Est venu le temps du souvenir pour Irène Jacob, et toutes ces questions encore et encore sur le Big Bang, l’infini, le mystère, les trous noirs… Plus tard, quand elle sera enceinte, son fils Antoine lui demandera : « Neuf mois, c’est long ou c’est court ? » Plus tard, elle se demandera : « Quatre milliards d’années, c’est long ou c’est court ? » L’infiniment grand, l’infiniment petit…
D’une écriture ample et soyeuse, l’auteure déroule une existence. La sienne. Avec ses joies et ses douleurs. Elle interroge, demande, voudrait comprendre. Sourires et rires sont là, le chagrin n’est jamais loin. Elle donne naissance à son deuxième enfant ; quelques jours avant, la famille s’est retrouvée dans la propriété d’un des frères d’Irène, au dessus du lac Léman. Tous réunis, ils répandent dans une vigne les cendres du père parti. Le big bang, ce n’est pas là-bas, au-delà du cosmos- c’est, chez les Jacob, la mort et la naissance, l’hier et le demain… Et, comme tapie au dessus des têtes, plane la dépression. Vers la cinquantaine, René en a été la victime. Cette maladie, il la connaissait- avant lui, sa mère en avait souffert… il s’est soigné et au bout d’un an, en a été guéri. « Avoir peur de la dépression, précise la romancière, ce n’est pas être dépressif ». Mais inexorablement, la mélancolie a pris place dans cette famille jusqu’à pousser la mère à se défenestrer…
Alors, Irène Jacob parle de ses enfants. Souvent. Un peu de son mari, lui aussi comédien. Et puis, comme dans son « Big Bang », elle évoque son père. Et explique : « On a plusieurs vies. Le thème du retour amène toujours beaucoup de réflexions, autour de la mémoire et du temps ». L’infini, le mystère… Les forces faibles de chacun, les trous noirs encore et encore, et toujours ces bras qui, avec amour, nous portent. « Big Bang », c’est, écrite par Irène Jacob, rien moins qu’une déclaration d’amour. A la vie !

Big Bang
Auteur : Irène Jacob
Editions : Albin Michel
Parution : 7 novembre 2019
Prix : 18,90 €

[bt_quote style="default" width="0"]Je rassemble des souvenirs de toi, papa, de ce monde de la physique quantique qui était ton métier, de l’histoire de la naissance de l’univers telle que tu me l’as contée au pied de mon lit d’enfant comme un conte de Perrault et telle que la raconte aujourd’hui à mers amis, en buvant une limonade, en étant dans la vie, en sentant le soleil sur mes joues, alors que tu es mort il y a quelques mois…[/bt_quote]

powered by social2s
Copyright © 2015 LAGRANDEPARADE – All rights reserved