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Into the hairy : Sharon Eyal nous invite dans un cœur/chœur vibrant de vie

  • Écrit par : Stéphanie de Montchalin

into the hairyPar Stéphanie de Montchalin - Lagrandeparade.com/ Sept incroyables interprètes nous offrent une danse de la vie dans ce qu’elle a de plus intime et de plus profond ; ils vont puiser là où les affects naissent, grandissent, jaillissent pour nous faire vibrer de mille émotions.

Dès le lever de rideau, nous sommes happés dans une ambiance brumeuse et enveloppante d’où émergent lentement les danseurs arachnéens aux sons d’une musique naturelle et tellurique invitant à la méditation profonde. Nous pénétrons dans un monde intérieur, enfoui dans une pénombre épaisse et ténébreuse comme l’annonce déjà le titre programmatique de cette pièce, Into The Hairy (A l’intérieur de la chevelure). Hypnotisés et aspirés dans cette toile, nous épousons peu à peu leurs battements, nous respirons avec eux, nous vibrons jusqu’à ne faire plus qu’un corps vivant comme si nous étions tous, public et danseurs, les cellules d’un grand organisme.
Le ravissement est immédiat et jusqu’au bout du spectacle, on ne peut se détacher de ce corps vivant, seulement quand celui-ci s’évanouira dans l’obscurité et quand la musique coupera net. Difficile de s’arracher à cette expérience sensorielle et émotionnelle qui nous amène au plus profond de nous-mêmes.
Ce voyage intérieur auquel nous sommes associés laisse en nous, longtemps après cette captivante chorégraphie, des images fugaces, des sensations troublantes comme le ferait un rêve que l’on vient juste de quitter mais qui reste encore prégnant une fois de retour à la réalité.

La vie palpitante transpire sur la scène. Les artistes se mettent à nu, dans un intime peau à peau, sublimés par de magnifiques académiques en dentelle noirs, créés par Maria Grazia Chiuri pour Christian Dior, qui épousent parfaitement leur anatomie sculpturale.

sharon Il y a quelque chose de l’ordre du pulsionnel, de l’animalité dans la gestuelle modelante des interprètes doués de métamorphoses ininterrompues. Tantôt oiseaux, échassiers, tantôt félins, parfois chimères ou humains allant jusqu’à l’organique, ils incarnent la vie incessante d’un grand cœur qui bat intrépidement tout au long du spectacle. Et ne cessent de naître sous nos yeux des tableaux qui saisissent des instants de vie fondamentaux : naissance, mort, amour, colère, résistance, autant d’arrêts sur image qui fixent les affects … Ces pauses picturales sont, à l’instar de miroirs, des projections de notre psyché et de nos émotions. Et l’énergie est toujours là, fourmillante de petits mouvements ténus et imperceptibles alternant avec des élans plus visibles dans l’espace scénographique. La danse contemporaine côtoie la danse classique chez la talentueuse chorégraphe israélienne, Sharon Eyal. Ses artistes, issus de sa compagnie charismatique L-E-V - un nom qui lui colle bien à la peau puisqu’il signifie en hébreu « le cœur » ou encore « la psyché » - évoluent au rythme de pulsations, de frémissements, de glissements et d’ondulations tissant les fils de la toile de nos propres émotions. Ils mettent à fleur de peau ce que nous avons de plus profond en nous, ce que les mots rendent difficilement.

La vie habite aussi la partition musicale du prodigieux créateur gallois, Koreless, qui mêle dans sa musique minimaliste plusieurs inspirations musicales : de la musique électronique, au chant de la Nature en passant par des bruits pour mieux rendre les émotions, rappelant à certains moments les cris assourdissants présents dans l’émouvant Thrène à la mémoire des victimes d’Hiroshima de Penderecki ou encore les sirènes et les crissements des trains entendus dans le saisissant Different trains de Steve Reich. Sa musique parvient à donner une expression vibratoire à nos émotions et en ce sens, elle forme une osmose parfaite avec la danse organique d’Eyal Sharon. Les deux artistes étaient faits pour se rencontrer tant leur sensibilité à fleur de peau se marie à merveille dans ce spectacle envoûtant !

Les jeux de lumière, quant à eux, ne sont pas accessoires. Ils sont en parfait accord avec les intentions des artistes, oscillant entre des clairs-obscurs mystérieux, des faisceaux de lumière froide isolant des solos, pour finir dans le rougissement de plus en plus incandescent et flamboyant d’un ultime brasier où les corps s’unissent et s’enflamment d’amour.

Dans l’évanouissement final qui enveloppe de nuit les interprètes, la musique demeure encore un peu comme un ultime cillement, comme un dernier battement de cœur qui bat avant que tout ne s’arrête soudain comme la vie après avoir vibré de mille émotions, de mille sensations, de mille petits mouvements aussi imperceptibles que les battements d’un cil.
C’est une expérience sonore et visuelle fascinante, un spectacle captivant brodé d’une fine dentelle artistique, déployant une véritable énergie d’où se propagent des ondes contagieuses entre les interprètes et le public, invité à vibrer dans les mêmes frémissements que ce cœur édifiant de vie qui ne cesse de se dilater et de se rétracter sous l’impulsion vive des émotions.

Le défi de Sharon Eyal, soutenu par son fidèle complice, Gai Behar, est une nouvelle fois relevé puisqu’elle réussit à merveille à mettre « la peau de (son) âme à nu » comme elle l’annonçait dans ses paroles.
A vivre intensément !

INTO THE HAIRY

L–E–V – Sharon Eyal | Gai Behar
Chorégraphie : Sharon Eyal
Co-créateur : Gai Behar
Musique originale : Koreless
Costumes : Maria Grazia Chiuri – Christian Dior Couture
Conception de l’éclairage : Alon Cohen
Conception des ongles et des bijoux : @prettybitchclawss
Danseurs : Darren Devaney, Guido Dutilh, Juan Gil, Alice Godfrey, Johnny McMillan, Keren Lurie Pardes, Nitzan Ressler
Directeur des répétitions : Davide Di Pretoro
Responsable de la production : Maya Manor
Directeur de la compagnie : Roy Bedarshi
Agent : Menno Plukker

Coproduction : Festival Montpellier Danse 2023, La Villette – Paris, Salzburger Festspiele – Austria, Sadler’s Wells – London, Julidans – Amsterdam, Spoleto Festival dei Due Mondi – Italy, MART Foundation – New York, Dampfzentrale, Bern, deSingel, Antwerpen.
Avec le soutien du Ministère de la Culture – Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France et de Orsolina 28 Art Foundation, Italy.
Certaines parties de cette création ont été créées à l’origine dans le cadre de THIS IS NOT A LOVE SHOW commandé par LAS (Light Art Space), en janvier 2022 au Kraftwerk Berlin.

Dates et lieux des représentations: 

- Du 22 au 25 juin 2023 à l'Opéra Comédie dans le cadre du Festival MONTPELLIER DANSE 2023

- Du 30 juin au 3 juillet 2023 - Spoleto, Italy | Teatro Nuovo Gian Carlo Menotti, Spoleto dei due Mondi

- Du 6 au 8 juillet 2023 - Amsterdam, The Netherlands | Julidans

- Les 17, 19 et 20 juillet 2023 - Salzburg, Austria | Salzburger Festspiele

A propos de la même compagnie :

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